sont noyés et absorbés dans cette mer de feuillages. C’est la poésie parnassienne. Seulement elle a oublié les deux petits bonshommes dont la présence suffit à illuminer le paysage : elle a oublié d’y mettre l’amour ; elle a oublié Daphnis et Chloé, qui ne sont que deux mouches, et qui, couchés là, renversent les proportions et font que la forêt immense n’est plus qu’un berceau de verdure. Mais ceci n’est qu’une impression personnelle. Il n’y a pas de recette pour vivifier la poésie. C’est un don qui nous est conféré quand on a la fierté de son état d’homme et de toutes ses sensations et de toutes ses émotions.
Il y a une étrange parenté entre la pure poésie parnassienne et la poésie didactique du premier Empire. L’une, comme l’autre, s’exerce presque toujours sur des sujets extérieurs à l’âme humaine, et son unique but est, dirait-on, de provoquer l’étonnement devant la difficulté vaincue. Elle nous donne l’impression d’être maniée par des artistes d’une habileté extrême, mais un peu mécanique, à qui le sujet importe peu, pourvu qu’il permette le déploiement de la virtuosité. Jamais aucune école ne fit une telle part au talent, et le talent est le tortionnaire de la poésie. Son exercice demande la plus grande discrétion. Il ne doit intervenir que dans les cas difficiles. Quand il s’étale tout le long d’une œuvre, comme dans celle de l’abbé Delille (aucun poète n’en