Page:Gourmont - Une nuit au Luxembourg, 1906.djvu/113

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monta à la tête et il se mit à croire en moi, en m’attribuant la toute-puissance. C’est alors que je cessai de le visiter, car je n’aime pas à me rendre le complice facile des divagations religieuses. Laissé à lui-même, il continua de m’entendre ; ma voix sonnait à son oreille sourde, comme un bourdonnement. Sa foi s’exaspéra, et il accepta le martyre. Quelle différence avec ce charmant Épicure pour qui nos entretiens ne furent jamais qu’un divertissement supérieur ! Mais ce Paul, quoique halluciné, n’était pas incapable d’une certaine imposture et c’est assurément pour se grandir aux yeux des sots qu’il feignit d’avoir été ravi au ciel. Il est vrai qu’il croyait à ma résurrection. Quelles histoires ! On dirait que les hommes ne donnent aux mots un sens précis que pour avoir le plaisir de les employer à contre-sens. Votre cerveau a des jeux bien