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BALZAC CHEZ LUI.

parfaite, veloutée, et enfin, quand elle était lancée et que la passion arrivait à la suite du drame, elle obéissait alors aux plus délicates intentions de la phrase, aux plus fugitives ondulations du dialogue. C’était bien, presque aussi bien qu’au théâtre ; quelquefois même c’était mieux, parce que c’était plus négligé et par conséquent plus humain. Il lisait surtout avec une grande conviction ; il s’abandonnait, il faisait pleurer, il faisait rire, pleurant et riant lui-même sans être un seul instant retenu par la timidité. Dans le rire particulièrement il saisissait, il entraînait ; il vous attelait, pour ainsi dire, à sa grosse gaieté à quatre roues, et, quoi qu’on en eût, il fallait le suivre, sauf ensuite à distraire de la part qu’on avait un peu trop largement faite à l’ouvrage, la part à laquelle avait droit le lecteur.

Balzac lut admirablement bien les quatre premiers actes des Ressources de Quinola. Si l’attention des auditeurs ne se sentit pas conduite sur un chemin bien sablé et bien régulier, et il s’en fallait de beaucoup, elle se plut à courir à travers cette forêt d’intrigues, de surprises, de péripéties, d’événements, plantés et taillés à la mode espagnole. Heureuse pour sa part d’oublier les servitudes et les chaînes de notre théâtre, qui est une véritable prison, elle fut charmée de tout