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BALZAC CHEZ LUI.

conspections, sûr moyen de ne jamais se prendre de froideur avec lui, je ne lui avais pas demandé quel visiteur j’avais eu l’honneur de coudoyer sous son toit. Il jugeait à propos maintenant de rompre le charme ; je n’avais qu’à m’en réjouir. Le héros valait certainement la peine d’être connu, à cause de tout le bruit amassé autour de son nom, à cause des grosses et ténébreuses affaires de police secrète qu’il avait conduites avec la pénétration du génie et souvent résolues avec une audace chevaleresque. Balzac, et certes il avait en cela grandement raison, tenait en très-haute estime ces sortes d’aptitudes privilégiées commises à la surveillance des familles et à la sécurité publique. Il admirait surtout la divination de ces esprits subtils entre tous les esprits, qui ont le flair aigu du sauvage pour suivre à la piste un criminel sur l’induction la plus fugitive, sans induction même. Une voix leur parle. Ils sont saisis d’un tremblement nerveux comme l’hydroscope sur le rocher qui recouvre la nappe d’eau à cent pieds sous terre, et ils s’écrient : « Le crime est là, creusez, il y est ! »

Balzac lui-même aimait à se parer de cette rare intuition. Et que de preuves n’a-t-il pas données qu’il la possédait au plus haut degré en nous faisant suivre fil à fil les passions les plus cachées du cœur et en