Page:Gozlan - De neuf heures à minuit, 1852.djvu/320

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n’aurait dû paraître plus disgracieux à la cour de Louis XVI que l’habit noir, ce deuil perpétuel ; les manches sèches, et les cheveux plats. Il arriva cependant qu’on trouva fort spirituel de remplacer l’étoffe par le coton, l’habit brodé par l’habit noir. Deux ans après cette réforme, notez-le bien, on coupait la tête à Louis XVI. Otez l’uniforme à vos soldats, et demain vous n’avez plus d’armée ; que les juges rendent la justice en habits marrons, sur des chaises de paille, et vous verrez dans peu ce qui arrivera.

Dire que, pour se conserver, tout doit demeurer immobile, serait une autre erreur, une erreur plus monstrueuse encore. Nous comprenons l’austère uniforme du méthodiste : il a un costume taillé sur sa doctrine ; il a bien fait de l’adopter. Ce n’est pas le changement, ce n’est pas la simplicité qu’il faut craindre : les deux choses sont excellentes en elles-mêmes ; mais on doit redouter la nouveauté dans les opinions, lesquelles sont toujours les éclairs précurseurs des faits qui sont si souvent des tonnerres, lorsque ces opinions se produisent avec la vivacité et l’éblouissement de l’antithèse, ce champagne du raisonnement.

Il a été trouvé ingénieux, dans ces derniers temps, de mettre en doute l’opportunité, la convenance même de la translation des cendres de Napoléon, sollicitée, demandée à genoux pendant vingt-cinq ans. On l’obtient de la magnanimité d’un ministre adroit à flatter les bons instincts populaires, et tout à coup il s’élève des voix pour dire, et je pourrais en désigner ici une des plus éloquentes, pour dire avec des larmes combien il eût mieux valu, dans l’intérêt de la poésie, laisser à Sainte-Hélène, entre quatre saules, les restes de l’empereur. Que voulez-vous attendre d’une nation descendue à ce degré d’esprit et de coquetterie ? Nous surpasserons bientôt, en fait de paradoxe, les