Page:Gozlan - La Dame verte, 1872.djvu/38

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À droite, à gauche, mes regards la cherchent, personne ! Solitude, obscurité, silence, partout.

Allons ! elle aura perdu patience, elle aura désespéré de me voir revenir : elle sera partie ! partie pour aller où ?… ne me l’avait-elle pas dit ?…

La vie, murmurai-je amèrement, est donc un leurre perpétuel ? Implorez, suppliez, rien ne se réalisera, rien ne répondra à vos cris lamentables ni à vos prières les plus ardentes ; abandonnez-vous alors au désespoir, lâchez la détente de l’arme posée sur votre front, lancez-vous du haut de la berge dans la rivière, et la fortune, cette railleuse maudite, accourra une minute après, vous apportant dans ses cauteleuses mains la chose pour laquelle vous avez perdu la raison ou la vie, toujours, toujours trop tard. Brisé, découragé, furieux contre la destinée, je me disposai, il fallait bien s’y résoudre, à quitter cette rue Pigalle qui m’avait coûté plus de sensations violentes en une seule soirée que dix ans d’existence au milieu des passions de la jeunesse, et comme l’air, de très-humide qu’il était, une heure auparavant, était devenu très-froid, je dépliai et j’endossai, pour parcourir le chemin qui me restait à faire avant d’arriver chez moi, le caban de toile gommée que j’avais gardé jeté sur mon bras depuis le commencement de la soirée.

Après avoir inutilement fouillé du regard vingt fois