Page:Gozlan - La Dame verte, 1872.djvu/37

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Le banquier se penche sur la roue aux trente-six numéros, l’agite, et la balle vertigineuse, que des regards de mille expressions diverses, haletantes, suivent dans sa course vagabonde sur les cases, va se loger dans la case qui porte mon numéro, le 9, cette fois. Gagné !

J’avais encore gagné ! entendez-vous, gagné ? oui gagné ! gagné ! c’était un rêve, un miracle, tout ce qu’il vous plaira, mais j’avais gagné. Je ne savais pas au juste ce que j’avais gagné : le banquier me compta six mille francs, limite extrême, je vous l’ai dit, de la perte que la banque pouvait supporter.

Ajoutez tout de suite ces six mille francs aux cinq mille quatre cents que j’avais réalisés comme premier bénéfice, et vous me verrez emportant onze mille quatre cents francs en papier. Était-ce assez beau ? Assez inouï ? assez prodigieux ?

Donc, victoire complète ! la si intéressante femme au voile vert, la femme placée sous le coup de je ne sais quel redoutable événement, allait recevoir de mes mains dans les siennes la somme inespérée, le papier providentiel dont dépendaient, m’avait-elle affirmé, son honneur et sa vie.

Sans avoir eu conscience de quarante ou cinquante marches que j’avais dévorées pour me rendre auprès d’elle, je me trouvai dans la rue ; elle n’y était plus.