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Page:Gozlan - Le Dragon rouge, 1859.djvu/105

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le dragon rouge.

puis deviner ni qui l’envoie, ni d’où elle vient. On l’a trouvée dans la boîte, et elle est sans timbre.

— Donne, et dis que dans une heure je me lèverai pour dîner. Va, Marine.

— Cela commande comme une princesse, dit Marine. En vérité, je crois que je lui prêterais mes joues si elle voulait me souffleter.

— On vous obéit, mademoiselle ; on vous obéit.

Et, tournant la tête à chaque pas pour admirer sa Casimire enfoncée dans la molle épaisseur de son oreiller, Marine quitta la chambre.

— De mon père ! dit Casimire après avoir examiné un angle de la lettre où se trouvait probablement un signe particulier convenu entre elle et M. de Canilly.

« Tout marche à souhait, mademoiselle ma fille, et comme au gré de nos désirs. De Varsovie à Paris j’ai voyagé sans accident. Dans les villes que j’ai traversées, j’ai été assez heureux pour ne me heurter à aucun visage de connaissance, choc dangereux, rencontre funeste dans ma position, ne voulant ni voir ni être vu, et ne voulant cependant pas trop me cacher dans les hôtelleries où j’étais forcé de descendre. Une fois à Paris, j’ai couru chez nos amis, qui, prévenus de mon arrivée, m’attendaient la nuit dans une petite maison des faubourgs.

« Ils étaient tous réunis. J’ai reçu leurs compliments sur la supériorité de mes vues et leur approbation entière. De mon côté j’ai été charmé de leur inébranlable résolution. Nous n’avons pas eu la plus légère difficulté à débattre. Notre correspondance avait aplani d’avance tous les obstacles.

« Ceci fait votre éloge, mademoiselle de Canilly, et vous prouve, une fois pour toujours, combien la langue diplomatique est la clef qui ouvre sans bruit les plus difficiles mystères ; car cette correspondance, si je l’ai un peu dirigée, j’en conviens, elle vous doit sa forme. Rien donc n’a été changé par nos amis au plan que je vous avais soumis. Dans dix jours,