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Page:Gozlan - Les martyrs inconnus, 1866.djvu/284

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— Ouvrez, dit Ambroisine à Julie ; c’est M. Janvier. Je le recevrai dans ma chambre.

Vaudreuse respira ; il passa dans la sienne, s’y renferma, et, en se mettant au bain, ce qui le consola de n’avoir pas pris du thé, il ne put s’empêcher de dire : — Il n’y a qu’Ambroisine pour recevoir ces gens-là.

C’est au bain que Vaudreuse lisait ordinairement ses lettres et ses journaux, et qu’il recevait ordinairement ses meilleurs amis, autre excentricité de la vie raffinée de Paris. Tel Richelieu du quartier d’Antin, soigneux dans sa tenue, réservé dans son langage au milieu du monde, ne voit aucune inconvenance à réunir autour de sa baignoire ses fournisseurs, et même les marchandes à la toilette, dont l’âge, il est vrai, n’est souvent pas la seule raison qu’elles aient pour subir cette licence. Je ne sais pas si les Orientaux vont plus loin. Quoi qu’il en soit, il arrive un moment, dans ces sortes d’ablutions libres, où l’on voit flotter à la surface de l’eau le journal du soir, les journaux du matin, des factures acquittées, des cigares de la Havane et des loges de spectacle.

Une petite porte, connue des intimes, s’ouvrit, et Anatole, le cigare aux lèvres et une boîte sous le bras, entra dans la chambre de Vaudreuse.

— Je suis heureux de te rencontrer, dit Anatole.

— Qu’as-tu donc dans cette boîte ?

— C’est une charge que nous allons faire aux Napolitains.