Page:Gozlan - Les martyrs inconnus, 1866.djvu/50

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avait le teint terne et blanc, les cheveux d’un noir méridional, la bouche fraîche et presque rose comme celle d’une jeune fille, des dents vives éclairant ses paroles au passage, un nez d’une charmante délicatesse de dessin, quoiqu’un peu large à la base, des yeux d’une soyeuse expression, mais bien près d’être moqueurs quand on se donnait la maladroite supériorité de vouloir avoir raison contre lui par la violence. Sa taille répondait à la distinction de ses traits, pris dans la galerie du grand monde par sa mère, pris dans la généalogie des Duportail-Carini par son père, d’origine italienne et, par conséquent, politique et subtile ; elle dépassait le niveau banal des hauteurs moyennes, et ici, comme dans les lignes et le caractère de son visage, le père avait donné l’équilibre parfait de la force, la mère celui de la grâce, qui se révélait en lui par ses pieds petits et voûtés, une cheville de cavalier arabe, des genoux secs emboîtant bien la cuisse et la jambe, des hanches fines, trop fines pour résister au développement fatal de l’embonpoint de la poitrine à l’heure où l’homme engraisse au courant de l’âge. L’âge malheureusement travaillait déjà, quoiqu’à petits coups, à cette déformation presque infaillible, et, comme nous l’avons indiqué, les oisivetés d’attaché d’ambassade, non payé, puis payé, les résidences prolongées de sous-secrétaire, puis de secrétaire, dans quelque bonne capitale bien nourrie, achevaient l’œuvre.

Ainsi Duportail, toujours élégant cavalier à trente-