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Page:Gozlan - Les vendanges, 1853.djvu/10

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LE CROUP.


I

Rien au monde n’est comparable aux boulevards de Paris. En arrivant de ma province, je fus frappé de la beauté de cette promenade que les étrangers eux-mêmes, dans leur opinion partiale, ne trouvent pas au-dessous de notre admiration. Une fois entré sous sa nef de verdure, je ne me lassais ni de marcher ni de m’arrêter. Je n’avais jamais vu tant de magnifiques maisons, supportées par les arches de cuivre ou de marbre, de tant de splendides magasins ; tant de figures empressées, tant de voitures rayonnant à mes côtés, courant devant moi, derrière moi, au loin. Je n’osais regarder ni au ciel, ni à terre. Pour mon étonnement, la perception exacte de la résistance et de l’espace avait disparu. Un tourbillon vivant m’enveloppait. J’étais ébloui, transporté, j’avais des vertiges, j’avais peur comme une jeune fille qui, pour la première fois de sa vie, est introduite dans un bal, chaud de lumière, de bruit, de paroles, plein de gens inconnus. Sans qu’on me remar-