Page:Gozlan - Les vendanges, 1853.djvu/67

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l’arrondissement par mon domicile, qui est le vôtre, et j’en suis encore par le sang, puisque j’ai épousé la fille du plus estimable commerçant de la rue Saint-Merri.

— Je te remercie, Fleuriot, de ton éloge, mais je le dirai la vérité tout entière. Tu ne passes pas pour un fort habile commerçant dans l’arrondissement. On t’y estime pour tes talents ; tu as fait brillamment ton droit ; tu écris avec goût, avec clarté ; tu jouis d’une renommée de probité incontestée ; on désirerait cependant que tu te montrasses plus souvent à la Bourse ; que tu n’allasses pas toujours en cabriolet chez tes confrères en droguerie ; que tu ne portasses pas constamment des bottes vernies et des gants blancs. — Au surplus ceci n’a été remarqué que du moment où tu as affiché des prétentions politiques.

— Mon cher monsieur Richomme, je ne vois, pas le rapport qu’il y a entre mes opinions et mes gants. Si je suis digne de représenter l’arrondissement, mon cabriolet, que j’ai depuis dix ans, ne peut m’ôter l’estime des électeurs. Mes moyens et les vôtres réunis sont assez satisfaisants pour permettre ce luxe, dont il me serait pénible de me priver. D’ailleurs, dans ma brochure, je démontrerai qu’il est temps de ne pas exclure l’élégance des manières, de l’indépendance même la plus absolue en matière d’opinions.

— Tu tiens à ta façon de penser, mais je crains que tu ne parviennes pas à changer celle des électeurs. Ils tirent des conséquences de tout. Puisque nous sommes en train de causer en famille, je te dirai également que ta femme est trop parée pour eux. Ils l’ont dit. Fais-en ton profit, mon cher Fleuriot. Attends-toi surtout à leurs observa-