Page:Gozlan - Les vendanges, 1853.djvu/81

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

une belle rue, large, bien éclairée. La rue Saint-Louis, au Marais, par exemple.

— Non. pas la rue Saint-Louis, mon amie, mais plutôt la rue de la Ferme-des-Mathurins, près de la Madeleine. C’est riche ; c’est au bout du monde. On n’y peut aller qu’en voiture.

— C’est bien loin du marché Saint-Martin.

— Il y a des marchés partout à présent, fille de ta mère, dit Fleuriot en souriant de la naïveté, mais un peu dépité de voir sa femme n’être qu’à moitié encore de son éducation du monde.

— Et nous irons souvent au spectacle, n’est-ce pas, Alexandre, quand papa et maman seront partis ?

— Oui, sans doute. Le foyer des théâtres est un lieu où l’on rencontre les notabilités littéraires et politiques, les députés au sortir de la chambre.

— Ainsi, Fleuriot, nous aurons une loge à la Gaieté. C’est un bien joli théâtre.

— À l’Opéra, tu veux dire, ma bonne amie.

— À la Gaieté ou à l’Opéra, je n’y tiens pas ; mais pour cela, comme tu le disais, mon ami, il faut changer de quartier et habiter une autre maison. Comme Stéphanie et Adèle seront surprises quand nous les inviterons à dîner dans nos salons et qu’elles marcheront sur des carreaux tellement cirés qu’elles auront peur de tomber !

— On a des tapis dans les salons où l’on reçoit, ma bonne Lucette. Penses-tu ensuite que tes bonnes amies Stéphanie et Adèle seront à leur aise au milieu des personnes d’un autre rang que nous serons obligés d’inviter ? On doit toujours craindre de déplacer les gens simples qui