Page:Gréard - L’Éducation des femmes par les femmes, Hachette, 1889.djvu/142

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c’est la création de Saint-Cyr. Après sa vie, Saint-Cyr a été son œuvre maîtresse.

Jamais elle n’avait perdu le souvenir des misères auxquelles aurait succombe une âme moins bien trempée que la sienne. Aussitôt qu’elle put disposer des faveurs du roi, elle nourrit le dessein d’épargner aux jeunes filles pauvres ce dont sa propre jeunesse avait tant souffert. Elle avait rencontré chez les Montchevreuil une religieuse ursuline, Mme de Brinon, qui, faute de ressources, avait dû abandonner le couvent qu’elle dirigeait à Rouen. Mme de Brinon s’était établie à Montmorency avec une de ses anciennes compagnes, Mme de Saint-Pierre. Ce fut le modeste berceau de Saint-Cyr. Mme de Maintenon avait fourni à Mme de Brinon quelques pensionnaires auxquelles « on apprenait leur religion, à lire, à écrire et à compter » (1680). Le plaisir qu’elle prenait à voir cultiver ces jeunes plantes, dit Languet, lui donna envie de les rapprocher d’elle, afin de pouvoir les visiter plus facilement. Elle loua à Rueil, aux environs de Saint-Germain, une maison qu’elle pourvut de tout ce qui était indispensable pour recevoir soixante jeunes filles de bourgeoisie et de petite noblesse (1682) ; elle comptait, au sortir de l’école, « les placer ou établir par mariage. » Peu après, elle y adjoignit une cinquantaine d’enfants pauvres qu’elle envoya de sa terre de Maintenon. Ces « petites sœurs » furent installées dans les communs et au rez-de-chaussée : les travaux manuels étaient leur principale occupation ; il s’agissait de les dresser à un métier : c’était, pour employer les formules modernes, une sorte d’école primaire professionnelle annexée à ce qui, eu égard au temps, représentait une école secondaire. Rueil