Page:Gréard - L’Éducation des femmes par les femmes, Hachette, 1889.djvu/143

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était pour Mme de Maintenon « un lieu de délices. » À peine était-elle partie qu’elle mourait d’impatience de se retrouver « dans son étable. » « J’en reviens toujours plus assotée, disait-elle ; le succès passe mon espérance. »

Le succès fut tel, que, moins de dix-huit mois après l’organisation de la maison, le roi, qui venait d’acquérir, pour l’agrandissement du parc de Versailles, le château de Noisy, décida que les élèves de Rueil y seraient établies. Trente mille livres furent consacrées aux travaux d’appropriation ; ils étaient achevés le 3 février 1684. Louis XIV avait promis d’entretenir cent jeunes filles. Ce nombre fut bientôt atteint et au delà. « Jugez de mon plaisir, écrivait Mme de Maintenon à son frère le 7 avril 1685, quand je reviens le long de l’avenue, suivie de cent vingt-quatre demoiselles. » Un plan d’organisation générale avait été adopté. Les élèves étaient partagées en quatre classes, suivant leur âge et leur instruction. Elles portaient un uniforme. On leur apprenait le catéchisme, la langue française, un peu de calcul et de musique, surtout les travaux d’aiguille. « Faisons, disait Mme de Maintenon, une maison qui soit le modèle des autres, non pour nous attirer des louanges, mais pour nous donner envie de les multiplier. » Sa visée, à ce moment, s’arrêtait là.

Elle ne tarda pas à concevoir une ambition plus haute. De toutes parts la cour venait voir ses filles. Le roi lui-même renouvelait ses visites. Il était fort préoccupé de l’état de la noblesse, qui se plaignait d’être sacrifiée. Dans tous les pays du monde, répétait-on après le marquis de Sourches, les emplois de guerre donnent les moyens de subsister : en France on se bat à