Page:Gréard - L’Éducation des femmes par les femmes, Hachette, 1889.djvu/147

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liées et captives, comme on fait en Italie et en Espagne : ce serait les traiter en esclaves et leur donner plus d’envie de goûter au monde, dont on les éloigne si fort. » Le Père La Chaise était d’accord sur ce point avec Fénelon. « L’objet de Saint-Cyr, disait-il, n’est pas de multiplier les couvents, qui se multiplient assez d’eux-mêmes, mais de donner à l’État des femmes bien élevées : il y a assez de bonnes religieuses et pas assez de bonnes mères de famille ; les jeunes filles seront mieux élevées par des personnes tenant au monde. » Pour Mme de Maintenon, dans le principe, il ne lui eût pas disconvenu de lier la communauté par des vœux absolus, afin de donner à la fondation plus de stabilité. Mais elle connaissait, elle aussi, les misères des couvents ; elle se défiait de la séquestration des religieuses, de leur oisiveté, de « leur sottise. » Quelques années plus tard, alors qu’elle se reprochait d’avoir cédé à ses premiers entraînements, elle appréciait les débuts de Saint-Cyr en ces termes d’une netteté saisissante : « Nous voulions une piété solide, éloignée de toutes les petitesses de l’esprit, un grand choix dans nos maximes, une grande éloquence dans nos instructions, une liberté entière dans nos conversations, un tour de raillerie aimable dans la société, de l’élévation dans notre piété et un grand mépris pour les pratiques des autres maisons. »

C’était l’agrément qui dominait dans ce programme, et l’agrément, en effet, est bien la note charmante de Saint-Cyr naissant. Lorsque les demoiselles y étaient entrées en venant de Noisy, qui déjà cependant ressemblait si peu à Rueil, elles s’étaient crues transportées dans le paradis terrestre. Il semble qu’on eût voulu