Page:Gréard - L’Éducation des femmes par les femmes, Hachette, 1889.djvu/160

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le reste. Âme profondément religieuse, elle avait fait de la religion le fondement de Saint-Cyr. Mais les règles de piété qu’elle prescrivait pour les enfants n’avaient rien d’étroit ni d’excessif. Si on les laisse trop longtemps à l’église, elle fait sévèrement l’observation que ce n’est pas leur place. Elle plaisante sur les colifichets et les agnus. Elle interdit les abstinences prolongées et les mortifications. « Il ne s’agit point de faire des religieuses, et pour celles qui auraient la vocation, ce n’est pas le moyen de s’y préparer. Que la piété qu’on leur inspire soit solide, simple, douce et libre ; qu’elle consiste plutôt dans l’innocence de leur vie, dans la simplicité de leurs occupations, que dans les austérités et les retraites. Quand une fille instruite dira et pratiquera de perdre vêpres pour tenir compagnie à son mari malade, tout le monde l’approuvera ; quand elle aura pour principe qu’il faut honorer son père et sa mère, quelque mauvais qu’ils soient, on ne se moquera point ; quand elle dira qu’une femme fait mieux d’élever ses enfants et d’instruire ses domestiques que de passer la matinée à l’oratoire, on s’accommodera très bien de cette religion, et elle la fera aimer et respecter. » Elle prêche le devoir « humainement. » Elle s’attache à l’esprit, non à la lettre. Elle ne permet pas surtout qu’on trompe l’enfant. Si on lui parle d’histoires, « il ne faut jamais lui en faire dont on ait à le désabuser plus tard, mais toujours lui donner le vrai comme vrai, le faux comme faux. » C’est agir en contresens de ses instincts et de son intérêt que de prendre de la peine pour s’abaisser jusqu’à lui par un langage enfantin : on ne s’en empare « qu’en l’élevant à soi au moyen de la raison, » qui n’interdit d’ailleurs aucun agrément. S’