Page:Gréard - L’Éducation des femmes par les femmes, Hachette, 1889.djvu/243

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musique, poésie, jeux, spectacles et plaisirs violents, travailler à se craindre et à se respecter, renouveler incessamment ses ressources d’entretien moral et de résistance : « Nous sommes toujours aussi forts contre nous-mêmes et contre les autres que nous voulons l’être. » — Être en soi, c’est n’attendre de la vie que ce qu’elle peut donner. Les plus belles existences se terminent comme les autres : on jette de la terre et en voilà pour une éternité ! Bien plus, au cours même de la vie, le temps emporte les peines et les plaisirs : toutes les choses entrent continuellement dans l’abîme du passé, dont elles ne sortent jamais ; nous ne vivons que pour perdre et nous détacher ; nous perdons même le goût de vivre. Quel avantage à se produire quand l’âge est venu et alors que nous ne pouvons plus montrer que les restes de nous-mêmes ? On ne se transportera pas à ce que vous avez été : c’est un travail ; et ce qu’on refuse aux mérites des hommes, encore moins l’accorde-t-on aux agréments des femmes. Mais il n’est rien qui ne se compense pour celui qui s’appartient et qui ne cherche point à se faire illusion ni à soi ni aux autres. Une vieillesse avouée est moins vieille ; une vieillesse où après les dispersions du monde on se ressaisit, où l’on se retrouve, affranchi de toutes les passions, dans la pleine sérénité de la pensée, est un asile de repos. « Ma fille, répète sans cesse Mme do Lambert, hors de soi point de bonheur durable… Ne nous croyons assurée contre les disgrâces que lorsque nous sentirons nos plaisirs naître du fond de notre âme… Tout âge est à charge à qui ne porte pas au dedans de soi ce qui peut rendre la vie heureuse… La plupart des hommes ne savent pas vivre dans leur propre