Page:Gréard - L’Éducation des femmes par les femmes, Hachette, 1889.djvu/264

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connaît aussi les qualités et les vertus contraires. Sur des choses d’un ordre plus élevé, sur la religion particulièrement, ses parents l’ont accoutumée à une soumission respectueuse, en lui répétant sans cesse : « Ma fille, ces connaissances ne sont pas de votre âge ; votre mari vous en instruira quand il en sera temps. » Pour les talents, c’est autre chose : Sophie en a et ne l’ignore point. Pendant quelque temps il lui a suffi de s’exercer à chanter juste ; puis elle a pris sur le clavecin quelques leçons d’accompagnement : en commençant, elle ne songeait qu’à faire paraître sa blanche main sur les touches noires ; bientôt elle trouva que le son aigre et sec de l’instrument rendait plus doux le son de la voix. Mais ce qu’on lui a enseigné avec le plus de soin, ce sont les travaux de son sexe, « même ceux dont on ne s’avise point, » comme de tailler et coudre ses robes : il n’y a pas un ouvrage à l’aiguille qu’elle ne sache faire et qu’elle ne fasse avec plaisir, surtout la dentelle, parce qu’il n’y en a pas un qui donne une attitude plus agréable et où les doigts s’exercent avec plus de grâce. C’est aussi une ménagère, et elle n’épargne pas ses soins aux devoirs domestiques. Pourtant elle n’aime pas la cuisine ; le détail en a quelque chose qui la dégoûte : elle laisserait plutôt tout la dîner aller par le feu que de tacher sa manchette, et rien ne la déciderait à toucher aux serviettes sales ; elle n’a jamais voulu, par la même raison, de l’inspection du jardin ; la terre lui paraît malpropre ; sitôt qu’elle voit du fumier, elle croit en sentir l’odeur. Bien faire ce qu’elle fait n’est que le second de ses soins : le premier est de le faire proprement et galamment. Elle n’a pas le bonheur d’être une aimable