Page:Gréard - L’Éducation des femmes par les femmes, Hachette, 1889.djvu/85

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qui attache le plus souvent les maîtres à la régularité absolue, si ruineuse pour l’esprit des enfants, disait-il, c’est qu’elle leur est plus commode qu’une sujétion continuelle à profiter de tous les moments. » ll s’imposa cette sujétion. Toutes les fois que le petit prince, P. P., — c’est ainsi qu’il le désigne par abréviation affectueuse, — semblait disposé à entrer dans une conversation utile, il lui faisait abandonner l’étude. Il lui épargnait toute contrainte. « Vous le porterez doucement à continuer ce qu’il a entrepris, écrivait-il à l’abbé Fleury, qui le secondait en qualité de sous-précepteur. Il faut accourcir le temps du travail et en diversifier l’objet ; vous le divertirez à dresser des tables chronologiques, comme nous nous sommes divertis à établir des cartes particulières. » Pour mieux graduer l’effort de l’enfant, il composait lui-même les textes de ses thèmes et de ses versions ; et jour à jour il avait rédigé — pendant la leçon, de manière à l’y faire participer — un dictionnaire de la langue latine, où le sens et la valeur des mots étaient fixés par des exemples. Il s’interdisait et il interdisait formellement à tout le monde les exercices qui pouvaient présenter un caractère d’abstraction, « de peur de rebuter, par des opérations purement intellectuelles, un esprit paresseux, impatient et où l’imagination prévalait encore beaucoup. » Pour la grammaire, l’usage, point de règles ; pour la rhétorique, de bons modèles, point de préceptes. En histoire, des extraits bien faits, des dialogues mettant en scène, avec les personnages, les idées qui avaient agité leur temps, et les circonstances décisives dans lesquelles ils avaient joué un rôle ; en morale, des fictions, comme le Télémaque, destinées à éclairer le futur