Page:Grégoire - De la littérature des nègres.djvu/62

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que l’éternelle sagesse puisse se contredire, et que le père commun des humains en soit comme vous le tyran ? Si, par impossible, il existoit sur la terre un homme nécessité à servir de proie à ses semblables, il seroit un argument invincible contre la Providence[1] ». On n’a pas encore vu un seul de ces Blancs imposteurs changer son sort avec celui de ces Nègres. Si les esclaves sont si heureux, pourquoi, jusqu’à ces dernières années, enlevoit-on annuellement, d’Afrique, quatre-vingt mille Noirs pour remplacer ceux qui avoient succombé aux fatigues, à la misère, au désespoir ; car de l’aveu des planteurs, il en périt une grande partie dans les premiers temps de leur séjour en Amérique[2].

Les colons s’obstinent à vouloir persuader aux esclaves qu’ils sont heureux ; les esclaves s’obstinent à soutenir le contraire. À qui

  1. V. Ibid., p. 27.
  2. V. Practical rules for the management and medical treatment of negroe-slaves in the Sugar colonies, by a professional planter, in-8o, London 1805, p. 470.