LETTRE
AUX PHILANTROPES.
Le 12 octobre 1790, doit être une époque à jamais
funèbre dans les fastes de l’histoire : à son retour périodique,
la liberté, l’humanité, la justice seront en deuil,
et la postérité, étonnée ou indignée, se rappelera qu’à
pareil jour une partie de la nation fut immolée aux préjugés,
à la cupidité de l’autre. Ce ne fut point une Saint-Barthelemi,
mais quel est le plus humain, celui qui
m’ôte en un moment la vie et ses peines, ou celui qui
me la prolonge, en me ravissant tout ce qui peut la rendre
supportable ?
L’esclavage des Ilotes est une tache ineffaçable à la mémoire des Spartiates. Lacédémone, à cet égard, devoit-elle trouver en France des imitateurs ? N’imputons point à l’assemblée nationale, mais à ceux qui l’ont induite en erreur, l’asservissement de nos frères, consacré d’une manière solemnelle. On décide, (chose inouie chez toutes les nations !) qu’il ne sera rien changé à l’état des personnes dans nos îles, que sur la demande des colons ; c’est-à-dire, que l’on n’extirpera les abus que sur le vœu de ceux qui en vivent, qui en sollicitent la prolongation ! c’est-à-dire, que les droits éternels des hommes seront subordonnés à l’orgueil, à l’avarice ! c’est-à-dire, qu’ils seront