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ROMAN D’UN PÈRE.

Maurice Vernex regarda ma fille avec une telle intensité d’étonnement que je crus lui devoir une sorte d’explication.

— M. de Lincy est un mari… un mari…, fis-je non sans hésiter.

— Despote ? glissa Maurice,

— Autoritaire ! fit Suzanne d’un ton magistral. Heureusement, il va au club, ajouta-t-elle, mi-rieuse, mi-triste.

— M’accorderez-vous la faveur de vous reconduire ce soir ? dit Maurice, avec cette voix richement timbrée qu’il n’employait point pour me parler à moi.

Suzanne secoua négativement la tête.

— Si vous osiez le déposséder de ce droit, dit-elle, mon vieux Pierre vous tordrait le cou sans cérémonie, comme à un poulet !

Nous causâmes encore quelques instants, puis Maurice se retira. Quand je fus seul avec Suzanne, elle vint se blottir dans un grand fauteuil, tout contre moi.

— Que dira M. de Lincy de cette visite ? demandai-je non sans quelque inquiétude.

— Ce qu’il voudra, répondit ma fille avec dédain.

Je gardai le silence. Puis, poussé par le besoin