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ROMAN D’UN PÈRE.

que je lui indiquerais, sous un nom supposé dont nous convînmes ensemble, et je le quittai, sûr au moins de pouvoir aplanir les difficultés matérielles.

Je me rendis alors chez madame Gauthier. En quelques mots je la mis au courant de la situation, et elle approuva sans réserve la résolution suprême que j’avais prise si vite. C’était une femme de tête et de cœur, je le vis bien, car elle renonça à embrasser sa petite-fille, sur la seule observation que je lui fis relativement au danger qu’elle nous ferait courir par cette démarche.

— C’est bien, dit-elle, allez ! Seulement, parlez de moi à Suzanne, pour qu’elle ne m’oublie pas !

Je la quittai le cœur serré, mais plein de tendresse reconnaissante pour cette femme vraiment forte dans les moments douloureux. Jusque-là ses défauts m’avaient empêché de rendre justice à ses qualités. Je me promis de réparer mon erreur, si la vie m’en donnait la possibilité.

Je passai ensuite chez moi, et je fis venir Pierre dans le coin le plus reculé de l’appartement.

— Écoutez, lui dis-je, voilà vingt-cinq ans