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ROMAN D’UN PÈRE.

définitivement la frontière entre mon gendre et nous.

J’ignorais absolument ce qui se passait à Paris, aucun journal n’arrivait dans ce coin reculé du monde. Malgré les regrets de Lisbeth, nous partîmes un matin, à l’heure où nous étions venus, mais cette fois dans la carriole de Lisbeth, qui avait voulu nous conduire elle-même. Après que nous fûmes montés dans le train, j’aperçus encore longtemps sa silhouette sur le ciel clair, et je sentis que j’aimais sincèrement la bonne vieille fille.

Quelques heures après, nous étions à Genève, c’est-à-dire à l’abri de la police française ; mais ce rendez-vous de l’Europe convenait mal à des gens qui ne veulent pas être reconnus. Après une nuit de repos, nous repartîmes pour le lac de Constance ; de là je voulais gagner Munich et ensuite l’Italie.

Cet excès de prudence m’était venu par la lecture des journaux. À Genève, en parcourant les feuilles éparses sur la table de l’hôtel, j’avais lu un entre-filet ainsi conçu :

« Il n’est bruit dans Paris que de la disparition inconcevable d’une jeune femme appartenant au meilleur monde parisien et mariée depuis