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ROMAN D’UN PÈRE.

nos promenades, notre silence même avaient pris un charme tout particulier. Nul ne peut se représenter ce que la présence de notre hôte apportait d’éléments à notre intelligence, de satisfaction à notre curiosité. Pendant ces deux années, nous avions vécu comme des parias, heureux d’oublier et d être oubliés ; nous rentrions ainsi dans la société, dans la vie intellectuelle. Jamais notre solitude ne nous avait pesé, à Suzanne, je crois, pas plus qu’à moi ; mais la tristesse était souvent assise à notre foyer désert. La venue de Maurice l’en avait bannie à jamais.

Quelle tristesse d’ailleurs eût résisté à ce franc sourire, à l’expression cordiale et spirituelle de cette physionomie, au regard sympathique et vif de ces yeux bruns ? Maurice était l’être le plus actif, le plus communicatif que puisse produire notre société, en restant dans les limites du bon ton ; il échappait à l’écueil ordinaire de ces tempéraments en dehors, la vulgarité ; rien n’était plus correct que sa tenue et son langage, et nul ne mettait plus de bonhomie dans sa façon d’être avec tous, grands et petits.

Juillet tirait à sa fin ; on avait déjà essayé les bains de mer, et je mûrissais le plan d’une cabine en planches à mi-chemin de la falaise,