Page:Graetz - Histoire des Juifs, A. Lévy, tome 1.djvu/18

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qui se termina par la ruine de la nationalité. Mais celle-ci se releva, grandit peu à peu sous la domination des Perses et celle des Grecs, développa de nouveau par les Maccabées une brillante floraison, pour succomber derechef sous les Romains. Mais elle n’a péri qu’en apparence, pour ressusciter de nouveau sous une autre forme. Deux fois ensevelie tout entière dans le tombeau, elle est deux fois remontée à la lumière. Ce qui n’est pas moins merveilleux, c’est que par deux fois l’essor de ce peuple a commencé sur la terre étrangère, au sein d’une mort apparente : la première fois en Égypte, la seconde fois en Babylonie, et même la troisième, si l’on veut, dans un milieu étranger et hostile. Un des prophètes d’Israël représente la croissance de ce peuple en Égypte sous la forme d’une fillette abandonnée dans un champ, couverte de sang et de fange, et qui, malgré cette abjection et cette misère, devient peu à peu une splendide jeune fille. Son développement dans la Babylonie est représenté par un autre prophète sous l’image d’une veuve d’abord privée de tous ses enfants, malheureuse et dolente, et qui, les voyant un jour accourir en foule de tous les coins de la terre, se trouve soudain consolée et rajeunie. Le troisième rajeunissement de la race juive a été aussi l’objet d’une comparaison bien frappante : la figure d’un esclave déguenillé, courbé, couvert de plaies saignantes, mais qui dépouille tout à coup cette repoussante enveloppe pour se changer en un beau jeune homme, plein de grâce, de force et de majesté. — Toute comparaison cloche, je le sais ; celles-là donnent cependant une idée assez juste d’un phénomène qui sort de la voie commune. C’est, en tout cas, un édit peu ordinaire que l’existence de ce peuple, qui date des plus vieux âges et montre encore la fraîcheur de la jeunesse ; qui a traversé tant de vicissitudes, et qui est resté fidèle à lui-même. Oui, vraiment, c’est bien le Juif errant, mais qui ne plie point sous la fatigue et n’aspire nullement au repos de la tombe !