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Page:Graetz - Histoire des Juifs, A. Lévy, tome 1.djvu/232

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mort violente arrêta leur main avant qu’elle pût saisir le burin, ou bien ils durent envelopper leur pensée du voile de l’équivoque. Tel le prophète Nahum l’Elkoschite. Comme si cette funeste période eût été prédestinée à l’oubli, les annalistes ne relatent de leur côté que fort peu de chose de ce qu’ils ont vu. C’est ainsi qu’un événement qui atteignait profondément la Judée put se produire sous le règne de Manassé, sans que les chroniques en parlent ou fassent plus que de l’indiquer.

L’un des fils de Sennachérib, dont la main parricide avait donné la mort à l’orgueilleux conquérant, s’était assis sur le trône déjà chancelant de Ninive. Il en fut précipité à son tour par le poignard de son frère Assar-Haddou (680-668), qui reprit contre l’Égypte l’expédition abandonnée par son père. Quelques-uns de ses généraux débarquèrent sur les côtes de Juda pour forcer la soumission de Manassé. Celui-ci, s’étant rendu en personne auprès d’eux pour obtenir une paix supportable, se vit charger de fers et conduire à Babylone. C’était un funeste présage pour la maison de David, devenue infidèle à son origine et aveuglément éprise des choses étrangères. À la même époque, le fils de Sennachérib transplanta de Babylone, Chutha, Separvaïm et d’autres villes, sur le territoire de Samarie, les prisonniers qu’il avait faits pendant ses guerres. Fait sans importance actuelle, mais gros de conséquences pour l’avenir. Ces exilés, qu’on appelait Chuthéens, du nom d’origine de la masse d’entre eux, et Samaritains du lieu de leur nouveau séjour, adoptèrent peu à peu les mœurs du faible reste d’Israël demeuré dans le pays après la chute du royaume des dix tribus. Ils firent des pèlerinages au sanctuaire de Béthel, dont le culte était encore desservi par des prêtres israélites, mais sans cesser pour cela d’adorer leurs idoles ; quelques-uns continuèrent même la pratique des sacrifices humains, et ils ne devinrent ainsi qu’à demi Israélites. Cette population bâtarde était appelée à jouer un rôle dans l’histoire ultérieure d’Israël.

Amon, fils de Manassé (640-639), était plus âgé que ne l’avait été son père à son avènement mais il ne montra pas plus de sagesse. Il laissa subsister tous les excès de l’idolâtrie ; cependant il ne paraît pas avoir, comme Manassé, persécuté le parti des