Page:Graetz - Histoire des Juifs, A. Lévy, tome 1.djvu/38

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les Israélites, de traverser son pays afin de gagner le Jourdain. Sichon refusa, lui aussi, et marcha avec son armée contre les tribus. La génération élevée par Moïse, bien différente de ses pères, accepta la lutte avec une juvénile ardeur, et battit, avec leurs rois Sichon et Og, les peuplades qui prétendaient lui barrer le passage.

Cette victoire des Israélites eut de grandes conséquences pour eux, et dans le présent et dans l’avenir. D’abord, ils prirent possession de toute la contrée, s’y cantonnèrent et mirent ainsi tin à leur vie nomade. De plus, ce premier succès leur donna la confiance et l’espoir de vaincre toutes les résistances qu’ils pourraient rencontrer dans la conquête de la Terre promise. Les peuplades voisines, informées de la défaite de ces puissants princes, tremblèrent devant les tribus voyageuses.

La péripétie née de ces étonnantes victoires fit éclore des chants, première apparition d’un génie sans lequel un peuple ne saurait prétendre à une place éminente. Les premiers vers chantés par la muse hébraïque furent des chants de guerre et de victoire. Les auteurs de ces poèmes (moschlim) furent, dès l’abord, en si haute estime que l’on conserva leurs productions dans un recueil, le Livre des guerres de Dieu. Il n’est resté que trois de ces poèmes, et à l’état de fragments... La poésie hébraïque, dans ses premiers essais, manque et de profondeur et de suavité, mais elle montre déjà une double originalité qu’elle devait porter plus tard jusqu’à la perfection, eu égard à la forme, elle a déjà la symétrie des hémistiches, autrement dit le parallélisme, où une même pensée se répète, dans deux ou trois membres successifs, sous des formes différentes. Eu égard au fond, cette muse naissante aime déjà l’ironie, fruit d’une double préoccupation : celle de l’idéal qu’elle porte en son âme, et celle de la réalité qui lui ressemble si peu...

Pour arriver à leur but, — la Terre de promission, — les Israélites ne pouvaient s’attarder plus longtemps dans les fertiles campagnes situées entre l’Arnon et le Jabok ; il fallait se mettre en mesure de passer le Jourdain. Ici se manifesta la fâcheuse conséquence de la conquête des pays d’Og et de Sichon. Les tribus de Gad et de Ruben déclarèrent, un beau jour, vouloir rester sur le