Page:Graetz - Histoire des Juifs, A. Lévy, tome 2.djvu/321

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nature, depuis le jour où elle fut révélée jusqu’à ce jour, et elle durera aussi longtemps que le monde. La nation judaïque, dans toutes les fortunes qu’elle a traversées, n’a jamais répudié une parcelle de sa loi, qu’elle vénère comme divine et sacrée. Ni la famine, ni la peste, ni la guerre, ni les menaces des tyrans n’ont pu détruire la Loi ; comment ne l’aimerions-nous, ne la glorifierions-nous pas au-dessus de toute chose ?

D’après Philon, c’est dans les monuments scripturaires des Judéens qu’est renfermée la véritable Sagesse. Ce que la plus saine philosophie enseigne à ses disciples, les Judéens le puisent dans leurs lois et leurs coutumes, nommément la connaissance du Dieu éternel, le mépris des fausses divinités, la charité et la douceur envers toutes les créatures. Ne méritent-elles pas, s’écrie-t-il, la plus profonde vénération, ces lois qui invitent le riche à donner une part de son bien au pauvre, qui consolent le pauvre par la perspective d’une époque où il n’aura plus besoin de mendier à la porte du riche et rentrera en possession de son bien ? L’arrivée de la septième année rend immédiatement l’aisance aux veuves, aux orphelins, à tous les déshérités. Aux propos calomnieux dirigés contre le judaïsme par Lysimaque, Apion et consorts, Philon oppose l’esprit de mansuétude qui respire partout dans les lois judaïques et qui s’étend jusqu’aux animaux, jusqu’aux plantes: Et ces misérables sycophantes osent décrier le judaïsme comme un ennemi du genre humain, lui dont l’essence n’est que charité !

C’est pour donner une idée plus saine des monuments littéraires du judaïsme à ceux des siens qui les raillaient et aux Grecs qui les mésinterprétaient, que Philon composa ses écrits, sorte de commentaire philosophique du Pentateuque, première tentative qu’on ait faite d’une exposition raisonnée du judaïsme.

Toutefois, si d’un côté Philon se maintenait strictement sur le terrain du judaïsme, il n’en était pas moins, d’autre part, imbu des doctrines de la philosophie grecque, si opposées à celles du judaïsme. L’esprit judaïque et l’esprit hellénique le dominaient avec une puissance égale et se disputaient la possession de sa pensée. En vain il s’efforça de concilier des faits essentiellement inconciliables. Pour faire disparaître la contradiction entre la doctrine