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jusqu’aux deuxième jour de Pâques, pour exciter les chrétiens à venger sur les Juifs la mort de Jésus. Il se produisait alors des troubles très graves, les chrétiens attaquaient les Juifs à coups de pierres, ceux-ci se défendaient fréquemment, et, des deux côtés, le sang coulait. Ces désordres devinrent traditionnels à Béziers, ils s’y renouvelèrent annuellement pendant des siècles. Les comtes de Toulouse avaient le droit de donner le vendredi saint un soufflet au syndic des Juifs de la ville, et on raconte qu’un chapelain, du nom de Hugo, demanda une fois l’autorisation d’exercer ce droit seigneurial et donna au syndic un soufflet si violent que la victime en mourut. Pour justifier cette coutume barbare, on prétendait qu’elle fut instituée à la suite d’une trahison commise par les Juifs envers la ville de Toulouse et au profit des musulmans. Plus tard, la colophisation fut remplacée par une taxe annuelle.

Louis II, fils de Lothaire, était favorablement disposé pour le clergé. Dès qu’il fut maître de l’Italie (885), il ratifia une décision synodale en vertu de laquelle tous les Juifs, dont les ancêtres étaient cependant venus dans le pays longtemps avant l’arrivée des Germains et des Lombards, devaient quitter l’Italie ; ceux qui ne seraient pas partis au 1er octobre 885 pouvaient être arrêtés et livrés à la justice par le premier venu. Cette mesure ne put heureusement pas être exécutée, parce que l’Italie était alors partagée en de nombreux petits territoires dont la plupart des chefs refusaient obéissance au roi.

En France, sous les successeurs de Charles le Chauve, lorsque l’autorité royale se fut affaiblie de plus en plus et que le fanatisme des seigneurs eut augmenté, le roi Charles le Simple en arriva, par bigoterie, à faire don à l’église de Narbonne des revenus des terres et des vignobles que les Juifs possédaient dans le duché de ce nom (899-914). Bien des seigneurs français se persuadèrent peu à peu que la protection accordée par Charlemagne et Louis le Débonnaire aux Juifs de leur État impliquait pour ces derniers l’obligation de se conduire réellement en protégés du souverain, c’est-à-dire de mettre, à sa disposition leur personne et leurs biens. Cette pensée présida certainement à la rédaction de l’acte par lequel l’usurpateur Boso, roi de la Bourgogne et de la Provence, dis-