Page:Graetz - Histoire des Juifs, A. Lévy, tome 3.djvu/41

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

tion du texte sacré le sens naturel, contribua pour une grande part au développement de la doctrine judaïque, où Akiba avait introduit un élément en quelque sorte révolutionnaire. Ismaël était, comme Akiba, un des jeunes docteurs de cette époque ; fils d’un des derniers grands prêtres qui avaient vécu avant la destruction du temple, il était probablement issu de la famille sacerdotale des Phiabi. Il tirait des revenus considérables de vignes qu’il possédait, et il consacrait ces revenus à l’éducation et à l’établissement de jeunes filles pauvres ou orphelines. Ses vues sur les rapports de la loi traditionnelle avec la loi écrite sont empreintes de bon sens et de sagesse, elles sont en opposition absolue avec la méthode artificielle d’Akiba. Un de ses principes était que les prescriptions traditionnelles ne devaient pas être en contradiction avec le texte de l’Écriture sainte. « Il est nécessaire, dit-il, que la halaka soit d’accord avec la loi écrite. Dans trois cas, seulement, la tradition n’a pas tenu compte du sens de la loi écrite, dans tous les autres cas, elle est et doit être subordonnée à cette loi. » Ismaël déclara également que la Thora s’exprimait à la façon des hommes et qu’elle employait, comme eux, des locutions, des répétitions et des tournures qui n’ajoutent absolument rien au sens du texte, mais servent uniquement à en embellir la forme ; il rejeta toutes les déductions d’Akiba qui avaient pour point de départ un pléonasme, une syllabe ou une lettre superflues. Ainsi, de ce qu’il y a dans un verset une lettre en trop, Akiba avait déduit qu’une fille de prêtre convaincue d’adultère serait brûlée. Ismaël lui répliqua : « Et c’est pour cette lettre que tu fais condamner une femme à être brûlée ! » Ismaël se prononça également d’une façon très nette contre les règles de l’extension et de l’exclusion qui occupaient une place si importante dans le système d’Akiba ; il n’admit que les lois d’interprétation de Hillel, si claires et si logiques. Et encore n’accepta-t-il de ces dernières que celles qui étaient indiquées dans la Bible. Ainsi, il s’efforça de démontrer que le raisonnement qui conclut du plus petit au plus grand (ab inferiori parte) est déjà employé dans la Thora ; ce qui autorise seul les docteurs à en faire usage. Il limitait cependant autant que possible l’application de ces règles d’interprétation, il ne voulait pas, par exemple, que la transgression d’une loi connue seulement par