Page:Graetz - Histoire des Juifs, A. Lévy, tome 4.djvu/138

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surexcitait particulièrement l’envie des chrétiens. Toutes les passions, toutes les cupidités, tous les mauvais instincts se coalisèrent alors contre les Juifs. Croisés désireux de s’enrichir, bourgeois voulant ruiner leurs concurrents, nobles impatients de payer leurs dettes sans bourse délier, moines brûlant d’un fanatisme sauvage, tous marchèrent contre la citadelle royale où la population juive de York avait trouvé un refuge. Ils étaient encouragés dans leur entreprise criminelle par un moine qui, vêtu de blanc, célébra, sous les murs de la citadelle, un service solennel, récita la messe et avala l’hostie pour appeler l’assistance divine sur cette horde de brigands et d’assassins.

Pendant plusieurs jours, les Juifs repoussèrent vaillamment les assauts répétés de leurs ennemis, mais les vivres vinrent à manquer. Que faire ? Après une longue et solennelle délibération ; ils résolurent presque tous de suivre l’avis d’un rabbin, Yom Tub de Joigny, et de se donner eux-mêmes la mort. Ils détruisirent leurs trésors, mirent le feu à la citadelle et s’entr’égorgèrent. En sa qualité de chef de la communauté, Jossé donna l’exemple ; il tua sa femme Anna, puis reçut la mort de la main du rabbin. Pas un seul membre de la communauté de York ne survécut ; la nombre des martyrs s’éleva à environ cinq cents (17 mars 1190).

Le jour suivant, qui était le dimanche des Rameaux (18 mars), les croisés massacrèrent à Saint-Edmond soixante-quinze Juifs. Dans toutes les localités où il y avait des Juifs en Angleterre, on comptait des martyrs. La communauté des prosélytes, composée d’une vingtaine de membres, fut exterminée. Indigné de ces atrocités, Richard chargea son chancelier d’ouvrir des enquêtes et de faire exécuter les coupables. Mais les croisés avaient disparu, et les nobles et les bourgeois qui avaient participé aux désordres s’étaient enfuis en Écosse.

À l’avènement du frère de Richard, le roi Jean sans Terre, la situation des Juifs resta très triste. Ce souverain sans scrupule, qui rabaissa l’Angleterre à l’état de vassale du pape et témoignait dans sa conduite des sentiments les moins élevés, ne devait naturellement pas se montrer bienveillant pour les Juifs de son royaume.

On connaît la situation des Juifs en Allemagne. Ils avaient bien