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Juda leva la main sur Saadia et, d’un ton violent, lui ordonna encore une fois de signer. Les gens du gaon le mirent à la porte. Se considérant alors comme outragé, David révoqua le gaon, l’excommunia et nomma à sa place un homme encore très jeune, Joseph ben Jacob ben Satia. Loin de se laisser intimider, Saadia destitua à son tour l’exilarque David et, d’accord avec ses partisans, il le remplaça par son frère Josia Hassan (930).

Il se forma alors deux partis, celui de Saadia et celui de David. Le gaon était soutenu par tous les membres du Collège de Sora et par de nombreux savants de Bagdad, il avait contre lui Aaron ibn Sardjadou et probablement Kohen-Cédék avec le Collège de Pumbadita. Les deux adversaires en appelèrent au khalife Almouktadir et achetèrent à prix d’argent les bonnes grâces de ses favoris. Sur l’ordre du khalife, le vizir Ali ibn Isa, assisté de plusieurs hauts dignitaires, fit comparaître les deux partis devant lui. Il n’intervint aucune décision sous Almouktadir, sans doute à cause du grand nombre de vizirs qui se succédèrent dans les deux dernières années du règne de ce khalife et à cause des troubles qui se produisirent fréquemment pendant cette période (930-932). Saadia et Joseph ben Satia continuèrent à remplir tous les deux les fonctions de gaon de Sora, et David ainsi que son frère Josia Hassan restèrent tous les deux exilarques.

Ce ne fut qu’après la mort d’Almouktadir, tué dans une émeute (octobre 932), et à l’avènement de son successeur, le khalife Kahir, que la cause fut définitivement jugée. Kahir était extrêmement pauvre, son trésor était à sec et il avait un besoin pressant d’argent. Comme les partisans de David disposaient de ressources plus considérables que ceux de Saadia, ce fut l’exilarque qui triompha. Kahir défendit à Saadia de conserver les fonctions de gaon et peut-être même de continuer à séjourner à Sora (933). L’anti-exilarque Hassan fut exilé à Khorassan, où il mourut.

Saadia vécut pendant quatre ans (933-937) très retiré à Bagdad. Quoique sa santé et son caractère se fussent altérés à la suite des déboires qu’il avait subis, son esprit avait conservé toute sa puissance, et c’est dans sa retraite, à Bagdad, qu’il composa ses œuvres les plus importantes et les plus originales. Il écrivit des travaux talmudiques et des prières rimées et non rimées empreintes d’une