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également et de pardonner. Le gaon accéda avec empressement à cette proposition. Quand Saadia et David se rencontrèrent, en présence d’une foule sympathique, dans la maison où devait avoir lieu la réconciliation définitive, ils s’embrassèrent cordialement et se promirent de vivre dorénavant en amis. Saadia resta pendant plusieurs jours l’hôte fêté de l’exilarque et fut rétabli avec des honneurs particuliers dans ses fonctions de gaon.

À la suite de cette réintégration, l’académie de Sora reconquit son éclat et sa supériorité sur sa rivale de Pumbadita. On la consulta des pays les plus éloignés sur des points de casuistique, et Saadia, malgré son déplorable état de santé, répondit à toutes les questions qui lui étaient soumises. La plupart de ses réponses, qui sont très nombreuses et datent en grande partie de la dernière année de son gaonat, sont écrites en arabe ; quelques-unes seulement sont rédigées en hébreu.

Après la mort de David (vers 940), Saadia fit preuve d’une grande générosité d’âme. Oubliant l’iniquité dont il avait été victime, il chercha et réussit à faire élever Juda, le fils de son ancien adversaire, à la dignité d’exilarque. Juda ne conserva ses fonctions que pendant sept mois ; il mourut, laissant un enfant de douze ans. Saadia recueillit l’orphelin dans sa maison et l’éleva avec soin, pour qu’il pût succéder un jour à son père. Il nomma provisoirement comme exilarque un parent de l’orphelin, un membre de la famille des Benè-Haiman, résidant à Nisibis. À peine installé, le nouveau Rèsch Galutha fut accusé, par des musulmans d’avoir outragé Mahomet, et il fut tué.

Quand le fils de Juda eut atteint l’âge d’homme, on l’investit de la dignité d’exilarque. Résolus, dans leur fanatisme, à ne pas tolérer que les Juifs eussent plus longtemps à leur tête un prince de leur religion, des musulmans, nobles et gens du peuple, formèrent un complot contre la vie de l’exilarque. En vain le khalife chercha à entraver l’exécution de ce projet. Le crime fut accompli. Pour ne pas mettre de nouvelles existences en danger, les représentants du judaïsme décidèrent de ne plus nommer d’exilarque. C’est ainsi que disparut l’exilarcat après une durée de sept siècles. Il succomba sous les coups du fanatisme musulman comme le patriarcat avait succombé auparavant en Judée sous les attaques