Page:Graetz - Histoire des Juifs, A. Lévy, tome 4.djvu/245

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devient pendant le sommeil. Un autre sujet sur lequel le Zohar revient fréquemment et avec une sorte de prédilection, c’est la souillure morale, le péché. Aux confins du monde de la lumière existe, selon lui, le monde des ténèbres, qui entoure le premier comme l’écorce enveloppe le fruit. Dans le Zohar, le principe du mal avec ses dix gradations est désigné sous le nom d’écorce, kelifa. Tous les pécheurs mentionnés dans la Bible, le serpent, Caïn, Ésaü, Pharaon, et, plus tard, Rome et les persécuteurs chrétiens du moyen âge, sont des enfants de ce principe du mal, tandis qu’Israël ainsi que tous les justes appartiennent au monde de la lumière. Quiconque se dirige à gauche (du côté du péché) et se souille, attire sur lui les esprits impurs, qui s’attachent à lui à jamais. Ce sont là des idées empruntées au Zend-Avesta. Le Zohar représente l’association de l’âme avec la lumière ou les ténèbres sous la forme grossière de l’union des sexes. Du reste, il voit partout le double principe mâle et femelle, même dans le monde supérieur. L’unité de Dieu n’est pas parfaite, dit-il, tant qu’Israël vivra dans l’exil ; elle n’atteindra réellement sa perfection que lorsque la princesse (Matronita), la Cabale, se sera unie au roi.

Vu les espérances messianiques qui fermentaient alors dans une partie de la population juive, Moïse de Léon ne pouvait naturellement pas s’abstenir de parler également du Messie dans le Zohar. Nais là encore se révèle l’imposture. Au lieu de placer l’avènement du Messie au temps de Simon ben Yohaï, c’est-à-dire au IIe siècle, le Zohar, à la suite de combinaisons de lettres et de nombres, l’annonce pour le XIVe siècle. On voit que Moïse de Léon voulait faire naître chez ses contemporains l’illusion qu’ils auraient peut-être le bonheur d’assister encore à ce merveilleux événement.

Tout en manifestant un profond respect pour le judaïsme rabbinique et en attachant à la moindre pratique religieuse un sens mystique, le Zohar, avec des airs innocents, cherche à amoindrir l’autorité du Talmud. Selon lui, il importe bien plus d’étudier la Cabale que le Talmud, car la première donne de l’essor à la pensée et lui permet de pénétrer tous les mystères de la création, tandis que l’étude du Talmud enlève à l’intelligence