Page:Graetz - Histoire des Juifs, A. Lévy, tome 4.djvu/248

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1305. Quoique versé dans le Talmud, Lévi ben Hayyim appréciait bien plus l’étude de la philosophie de Maimonide et de l’astrologie d’Ibn Ezra. Plus prétentieux que profond, il ne se rendait nullement compte du but poursuivi par l’auteur du Guide, il ne voyait dans tout le judaïsme qu’un ensemble de doctrines philosophiques. Ses interprétations naïves et enfantines avaient la vertu d’étonner ses contemporains par leur profondeur.

C’est à Perpignan, la capitale du Roussillon, province appartenant alors au roi d’Aragon, que se trouvait le foyer de cette fausse philosophie. Les Juifs de cette ville, tout en étant assez malheureux, parqués qu’ils étaient dans la partie la plus misérable de la ville, au quartier des lépreux, avaient néanmoins conservé le goût de l’étude et des recherches scientifiques, et prêtaient une oreille attentive aux idées que leur exposaient les commentateurs de Maimonide. Même le rabbin de la communauté était ami de la science et adversaire résolu de cette foi aveugle qui s’abrite derrière la lettre et est effrayée de tout raisonnement. C’était, en ce temps, Dun Vidal Menahem ben Salomon Méïri (né en 1249 et mort en 1320), homme qui n’avait pas une valeur supérieure, mais qui ne manquait pas de mérite et possédait deux qualités qui, d’habitude, faisaient défaut aux Juifs de ce temps : le tact et la modération.

À Perpignan, Lévi ben Hayyim avait trouvé une large et cordiale hospitalité auprès de Don Samuel Sulami ou Sen Escalita, dont tous les contemporains louaient la piété, le savoir et la générosité. Là, il se mit à correspondre avec Ben Adret ; ce fut aussi dans cette ville qu’il commença son œuvre d’interprétation de la Bible et de l’Aggada.

Tout en désapprouvant formellement les exagérations des allégoristes, Méïri ne croyait pas pouvoir s’en autoriser pour condamner la science elle-même. Mais à Montpellier, patrie de l’obscurantiste Salomon, cet adversaire acharné de Maïmonide, il existait alors quelques zélateurs qui, restés calmes devant les élucubrations des cabalistes, ne pouvaient s’empêcher de partir en guerre contre le clan peu important des allégoristes. Pour un peu, ils auraient de nouveau jeté la discorde parmi les Juifs. L’instigateur de cette lutte appartenait à cette catégorie de gens