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(Égypte) et établi ensuite à Misr (Caire) ; Huschiel, vendu dans un port de l’Afrique et rendu à la liberté à Kairouan ; le troisième était probablement Nathan ben Isaac Kohen, le Babylonien, qui, à ce que l’on croit, se rendit à Narbonne ; enfin le quatrième était Moïse ben Hanok.

Moïse ben Hanok subit de nombreuses tribulations. Étant seul marié parmi les quatre délégués de Sora, il avait emmené avec lui sa femme et son jeune fils. Sur le vaisseau, l’amiral Ibn Ruhami convoitait la compagne de Moïse, qui était d’une beauté remarquable, et le lui fit comprendre. La jeune femme, effrayée du sort qui la menaçait, demanda en hébreu à son mari si les personnes qui périssaient dans la mer seraient aussi un jour rappelées à la vie. Sur la réponse affirmative de Moïse, elle se précipita dans les flots.

Amené avec son enfant comme esclave à Cordoue, Moïse fut racheté par la communauté. Pour ne pas tirer de profit matériel de l’enseignement de la Loi, il laissa ignorer sa profonde érudition talmudique. Ce fut sous des haillons qu’il se rendit un jour à l’école de Cordoue, où enseignait alors le rabbin et juge Nathan, homme peu versé dans le Talmud mais admiré en Espagne comme une des lumières du pays. Assis comme un auditeur ignorant dans un coin près de la porte, il ne put s’empêcher, en entendant Nathan expliquer en écolier un passage du Talmud, de faire timidement quelques objections. Les assistants reconnurent immédiatement un maître dans le malheureux qu’ils venaient de racheter ; ils le pressèrent d’élucider le passage controversé et de résoudre en même temps d’autres questions soumises à l’examen du rabbin. À la grande surprise et à l’admiration de l’assistance, Moïse exposa ses idées avec une érudition et une compétence rares. Ce jour même, Nathan, faisant preuve d’un remarquable désintéressement, déclara qu’il cédait sa place de juge et de rabbin au savant étranger qui était veau à l’école sous des vêtements de mendiant. La communauté de Cordoue plaça alors Moïse ben Hanok à sa tête, le combla de présents, lui assura un traitement annuel et mit un luxueux carrosse à sa disposition.

En apprenant que son prisonnier avait une si haute valeur, ibn Ruhami voulut rompre le marché qu’il avait conclu avec la com-