Page:Graetz - Histoire des Juifs, A. Lévy, tome 4.djvu/274

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de Pampelune, capitale de la Navarre, semble avoir échappé aux attaques de ces forcenés.

En Castille du moins, on l’a vu plus haut, la situation des Juifs était satisfaisante. Ils y étaient à l’abri des violences sanglantes qui sévissaient si fréquemment contre leurs coreligionnaires des autres pays. Mais, là aussi, ce ne fut qu’une éclaircie de très courte durée. Alphonse XI, quand il eut atteint sa majorité et pris lui-même les rênes du gouvernement (1325-1380), admit parmi ses favoris deux Juifs, Don Joseph d’Ecija et Samuel ibn Wakar. Le premier, dont le nom complet était Joseph ben Ephraïm Beneviste Hallévi, était d’une belle stature, de manières affables, et savait la musique. Sur la recommandation de son oncle, le roi le nomma son trésorier et même son conseiller intime (privado). Joseph d’Ecija ne sortait qu’en carrosse officiel, accompagné de chevaliers, et des grands d’Espagne mangeaient à sa table.

Un jour, le roi lui confia une mission qui faillit lui coûter la vie. Envoyé à Valladolid, il fut assiégé dans le palais de l’infante, et le peuple le réclama pour le tuer. Quelques personnes de sa suite purent s’échapper et informer le roi de ce qui se passait. Celui-ci accourut, appela les chevaliers de la Vieille Castille auprès de lui, mit le siège devant Valladolid et menaça de détruire la ville si on ne remettait pas son ministre en liberté. Effrayés du châtiment qui les menaçait, les habitants de la ville envoyèrent auprès du roi des délégués pour apaiser sa colère et lui expliquer qu’on n’en voulait pas autant à Don Joseph qu’à un courtisan chrétien, Don Alvar Nunez. Pour donner satisfaction au peuple, Alphonse XI destitua Nunez de ses diverses fonctions, mais conserva toute sa confiance à Don Joseph.

Don Samuel ibn Wakar (Abers huacaz), l’autre favori juif, était le médecin, l’astronome et aussi quelque peu l’astrologue de son souverain. Tout en n’exerçant aucune fonction politique, il jouissait quand même d’un grand crédit à la cour. Comme il arrive fréquemment entre courtisans qui tirent leur éclat du même soleil, Don Joseph et Ibn Wakar se jalousaient l’un l’autre, et leur rivalité allait avoir des conséquences fâcheuses pour leurs coreligionnaires.

À la suite de plaintes portées par le peuple contre des usuriers