Page:Graetz - Histoire des Juifs, A. Lévy, tome 4.djvu/311

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

moyen âge, une figure très originale. Pendant que les autres rabbins du temps, sous l’influence d’Ascher et de son école, ajoutaient aggravations sur aggravations, et, en cas de doute, penchaient toujours pour la solution la plus rigoureuse, Galipapa était, au contraire, d’avis qu’il fallait prendre en considération tous les passages du Talmud qui permettent de rendre plus facile l’observance des usages religieux. Ce principe, Galipapa l’appliquait dans la pratique. Dans d’autres questions aussi, ce rabbin osait s’écarter de la routine et avoir des vues personnelles. Ainsi, il émit l’opinion que le livre de Daniel ne contient pas de prophéties, mais reflète les impressions produites par la lutte des Macchabées. De telles idées étaient en contradiction absolue avec celles de Ben Schèschet, qui ne craignit pas de réprimander Galipapa comme un écolier, quoique ce dernier fût déjà très âgé, eût formé de nombreux élèves et jouit d’une grande considération.

L’autorité de Hasdaï Crescas et d’Isaac ben Schèschet s’étendait au delà de l’Espagne. On leur demanda de France de se prononce. dans une querelle qui avait éclaté à propos de la nomination du chef religieux des communautés juives de ce pays.

Il s’était alors produit en France, dans les affaires juives, des modifications causées en partie par la situation politique du pays. Manessier de Vesoul, le protecteur de ses coreligionnaires, ainsi que le grand-rabbin Matatia, très considérés tous deux dans les communautés et à la cour, étaient morts, et leurs fils avaient hérité de leurs fonctions. Salomon de Vesoul avait été préposé à la perception des impôts juifs, et Yohanan, fils de Matatia, placé, avec l’autorisation royale, à la tête des Juifs de France. Il exerçait depuis cinq ans ses fonctions de rabbin et de directeur d’une école talmudique, quand un ancien élève de son père, Isaïe Astruc ben Abba Mari, vint de Savoie en France avec pleins pouvoirs du rabbin allemand Meïr Hallévi, de Vienne, pour nommer les rabbins. Il avait le droit d’excommunier quiconque occuperait un poste de rabbin sans son autorisation, et déclarer nuls et non valables tous les actes de ce rabbin, notamment ses actes de mariage ou de divorce. Sur le refus de Yohanan de lui obéir, Isaïe Astruc le destitua.

L’influence de la famille de Vesoul était alors bien diminuée, et