Page:Graetz - Histoire des Juifs, A. Lévy, tome 4.djvu/317

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

en fut informé et fit échouer la conspiration. Léonore fut alors jetée en prison ainsi que son favori Juda. Celui-ci devait même être exécuté, il n’obtint sa grâce que sur la démarche que son ancien rival David Negro fit en sa faveur auprès du roi. Cette querelle eut pour effet de diviser les forces dont disposait Don Juan et de l’obliger à renoncer à la couronne de Portugal.

S’il arrivait parfois que par vanité, par ambition, ou pour toute autre raison, des rabbins luttaient entre eux pour être nommés à un poste élevé, comme ce David Negro et Juda, et, en France, Isaïe ben Abba Mari et Yohanan, il faut reconnaître que ces cas regrettables étaient excessivement rares. Presque toujours, les fonctions rabbiniques étaient considérées comme un sacerdoce, que les titulaires exerçaient avec dénouement et désintéressement. Ils se distinguaient dans leur communauté non seulement par leur savoir et leur piété, mais aussi par la noblesse de leurs sentiments, la pureté de leurs mœurs et la scrupuleuse loyauté de leur conduite. On peut dire que les rabbins de ce temps présentaient un heureux contraste avec certains prêtres chrétiens, surtout après qu’Avignon fut devenu le siège de la papauté, que les cardinaux eurent formé deux collèges ennemis et que la chrétienté elle-même se fut divisée en deux camps opposés.

Ce qui frappe surtout chez quelques ecclésiastiques, prêtres d’une religion de paix et d’amour, c’est leur haine implacable pour les Juifs, c’est leur aveugle fanatisme. Sous l’empereur Wenceslas, les excitations enflammées d’un prêtre chrétien provoquèrent à Prague le massacre de plusieurs milliers de Juifs ; leurs cadavres furent même profanés, les synagogues incendiées, les rouleaux de la Loi déchirés et foulés aux pieds (1389). Deux ans plus tard, un autre prêtre fanatique, Fernan Martinez, archidiacre de Séville, créa dans cette ville un mouvement contre les Juifs qui se propagea dans toute l’Espagne et eut les plus désastreuses conséquences. Dans ses prédications, il parlait tantôt contre leur obstination aveugle à persister dans leurs croyances, tantôt contre leurs richesses et leur indomptable orgueil ; toujours, il les attaquait avec violence. À Séville, le terrain n’était que trop bien préparé pour faire fructifier ces germes malfaisants, car la population de cette ville détestait les Juifs à cause de la part qu’ils avaient prise