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Page:Graetz - Histoire des Juifs, A. Lévy, tome 4.djvu/333

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de Castille. Entre deux persécutions, il traduisit en hébreu l’Éthique d’Aristote. Il fit cette traduction d’après un texte latin, parce que les savants juifs de l’Espagne n’étaient plus très familiarisés, à cette époque, avec la langue arabe. Alguadès publia ce travail à l’instigation et peut-être avec la collaboration d’un personnage considérable de Saragosse, Don Salomon Benveniste ibn Labi de la Caballaria, dont le fils eut le courage, en un temps de sanglantes violences, de défendre le judaïsme avec une ardeur de conviction et une énergie inébranlables, et dont plusieurs parents abjurèrent le judaïsme et devinrent les adversaires implacables de leurs anciens coreligionnaires.

Les temps étaient, en effet, devenus durs pour les Juifs d’Espagne, et beaucoup d’entre eux n’eurent pas la force morale nécessaire pour persister dans la foi de leurs pères. Tant que le jeune roi Don Henri III occupa le trône de Castille, la situation resta supportable. Mais elle empira après la mort de ce souverain (1406). L’héritier du trône, Juan II, avait deux ans, et la reine mère, Catalina (Catherine) de Lancastre, à qui fut confiée la régence, étau une jeune femme capricieuse, hautaine, dévote, se laissant entièrement dominer par ses favorites. Elle avait pour co-régent l’infant Don Ferdinand (plus tard roi d’Aragon), qui était d’un caractère doux et prudent, mais obéissait aveuglément au clergé. Enfin, parmi les conseillers du royaume se trouvait l’apostat Paul de Santa-Maria, l’ennemi acharné des Juifs. Nommé par le défunt roi, Don Henri III, exécuteur testamentaire et précepteur du jeune prince, Paul jouissait d’une très grande influence dans le conseil de régence. Belle perspective pour les Juifs de Castille ! Leurs craintes ne se réalisèrent que trop vite. La cour ne tarda pas à leur témoigner de la malveillance et à faire prendre contre eux des mesures humiliantes.

En effet, en 1408 parut, au nom du jeune roi, un édit qui remettait en vigueur tous les paragraphes du recueil des lois d’Alphonse le Sage qui étaient hostiles aux Juifs. Comme l’accès des Juifs aux emplois publics, dit cet édit, fait du tort au christianisme et à ses adeptes, il faut les en éloigner. Aussi tout Juif qui acceptait une fonction de la part d’un noble ou d’une ville était-il passible d’une amende s’élevant au double de ce que cette