Page:Graetz - Histoire des Juifs, A. Lévy, tome 4.djvu/420

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que son père, était dur et dissimulé. Séduit par la politique de son contemporain Louis XI, roi de France, il essaya, lui aussi, de créer une monarchie absolue en abattant les grands du Portugal. Il commença par le duc Fernando de Bragance, qui, issu de sans royal, était peut-être aussi puissant et certainement plus aimé que le roi.

Pendant qu’il accablait le duc de Bragance de protestations d’amitié, il faisait dresser en secret un réquisitoire où il l’accusait d’avoir conspiré contre lui avec le couple royal d’Espagne, accusation dont aujourd’hui encore on n’a pas pu prouver la réalité. Le duc de Bragance fut emprisonné, jugé comme traître et exécuté (juin 1483), et ses possessions furent ajoutées au domaine royal. Ses frères prirent la fuite. En sa qualité d’ami du duc de Bragance et de ses frères, Isaac Abrabanel fut également impliqué dans l’accusation de trahison, et un jour le roi João lui fit dire de venir se présenter devant lui. Sans rien soupçonner, Abrabanel se rendait à la cour quand un ami inconnu l’accosta, l’informa du danger qu’il courait et lui conseilla de s’enfuir.

Abrabanel suivit ce conseil et, quoique poursuivi par de nombreux cavaliers, arriva sain et sauf en Espagne. De là il écrivit au roi João II en termes très respectueux, mais très fermes, pour protester de son innocence et repousser en même temps les accusations dirigées contre le duc de Bragance. Mais le souverain portugais ne tint nul compte des protestations d’Abrabanel et fit confisquer ses biens ainsi que ceux de son fils Juda Léon, quoique ce dernier, qui était médecin, possédât une fortune toute personnelle. Il permit pourtant à sa femme et à ses enfants d’aller le rejoindre en Castille.

Accueilli par ses coreligionnaires d’Espagne avec des démonstrations de respectueuse estime, Abrabanel eut bientôt réuni autour de lui un grand nombre de savants et de disciples. Il se lia surtout avec le rabbin Isaac Aboab et le fermier général des impôts, Abraham Senior, qui parait même l’avoir associé à ses fonctions dès son arrivée en Espagne. Dans ce pays, il fut pris de scrupule d’avoir délaissé l’étude de la Loi pour les affaires politiques, et, à ses yeux, son malheur était un juste châtiment que lui envoyait la Providence. Aussi s’empressa-t-il, sur les instances