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Page:Graetz - Histoire des Juifs, A. Lévy, tome 4.djvu/51

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venue d’Orient, avait dépassé son point culminant en Espagne et commençait à décliner avec le morcellement du khalifat des Ommayyades, quand la civilisation juive jetait ses premières lueurs et marchait rapidement vers son apogée. Dans un seul demi-siècle, on vit surgir nombre de personnalités remarquables, dont une seule aurait suffi pour illustrer une époque : c’étaient les princes Samuel et Joseph Naguid, le poète et philosophe Ibn Gabirol, l’exégète Ibn Djanah, sans compter les savants de moindre envergure. Cette première période rabbinique, ainsi appelée à cause de l’indépendance acquise par les écoles talmudiques et les rabbins d’Europe à la suite de la ruine du gaonat, est une période classique. Par ses travaux originaux et ses importantes recherches scientifiques exécutées dans toutes les directions, elle éclipsa totalement les époques précédentes. La science grammaticale de l’hébreu arriva à sa pleine maturité, la poésie néo-hébraïque atteignit sa plus puissante expression. La philosophie, considérée jusqu’alors parmi les Juifs comme l’humble servante de la théologie, conquit son indépendance et s’éleva aux plus hautes conceptions. L’enseignement talmudique lui-même se créa une méthodologie en réunissant les détails disséminés et isolés pour établir des règles fixes. Dans le mouvement intellectuel de ce temps, les Juifs occupaient sans conteste le premier rang.

À ce moment, la vie intellectuelle et religieuse des Juifs était tellement intense en Andalousie que cette contrée devint le centre du judaïsme et apparaissait aux communautés du dehors sous l’aspect d’un État juif. Aussi les enfants fugitifs du prince juif des Khazars et les deux fils du dernier exilarque vinrent-ils y chercher j`un refuge. À la tête du judaïsme andalous se trouvait alors une personnalité aussi distinguée par ses vertus et sa sagesse que par sa haute position politique : Samuel ibn Nagrela ou Nagdela. Réunissant dans sa personne les qualités des trois grands hommes qui fondèrent la gloire de l’Espagne juive, il était généreux et ami de la science comme Hasdaï, savait le Talmud comme Hanok, était poète et grammairien comme Dounasch ben Labrat.

Né en 993 à Cordoue, où son père Joseph était venu s’établir de Mérida, il fréquenta l’école talmudique de Hanok et fut initié aux finesses et aux difficultés de l’hébreu par Juda Hayyoudj. D’autres