Page:Graetz - Histoire des Juifs, A. Lévy, tome 5.djvu/153

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les chrétiens. Comme les Juifs allemands se distinguaient de leurs coreligionnaires portugais par leur langue, leurs manières, leur extérieur moins élégant, par toutes leurs habitudes, ils ne s’associèrent à aucune des communautés déjà existantes, mais formèrent une nouvelle communauté avec un rabbin spécial. Il y eut donc alors à Amsterdam trois communautés portugaises et une communauté allemande.

Sous l’impulsion de Jacob Curiel, qui fut plus tard représentant du Portugal à Hambourg, les trois groupes portugais se fondirent en une communauté unique (1639). C’était alors, certainement, la communauté la plus florissante et la plus considérable que l’on connut, disposant de ressources importantes et jouissant d’une situation particulièrement favorable. Pour répandre la connaissance du judaïsme et de ses doctrines parmi les Juifs d’Amsterdam, les chefs de la communauté organisèrent un établissement d’instruction (Talmud Tora), où, peut-être pour la première fois, l’enseignement juif fut donné d’après un programme déterminé et avec une certaine méthode. Les élèves pouvaient commencer par l’alphabet et s’élever progressivement jusqu’aux études talmudiques les plus ardues. On y enseignait aussi la philologie hébraïque, l’éloquence et la poésie néo-hébraïque. Les classes supérieures étaient dirigées par les principaux rabbins ou hakhamim ; c’étaient, à cette époque, Saül Morteira et Isaac Aboab. Ces deux rabbins formèrent, avec Manassé ben Israël et David Pardo, le premier collège rabbinique d’Amsterdam. De cette école sortirent des élèves qui acquirent une grande réputation, et dont nous mentionnerons, à cause du contraste si vif de leurs tendances, le cabaliste Zaccuto et le célèbre philosophe Baruch Spinoza.

Si les guides religieux de la communauté d’Amsterdam avaient été des esprits vigoureux, hardis et profonds, ils auraient pu, dès cette époque, rajeunir le judaïsme et lui infuser une force nouvelle. Ils exerçaient, en effet, une influence considérable, disposaient d’abondantes ressources et vivaient dans un milieu cultivé et animé des meilleurs sentiments. Les circonstances aussi se seraient admirablement prêtées à d’utiles réformes. Mais les membres du collège rabbinique d’alors manquaient des