Page:Graetz - Histoire des Juifs, A. Lévy, tome 5.djvu/167

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de leur hetman Pawliuk (vers 1638), deux cents Juifs furent tués et plusieurs synagogues détruites. Ils n’en persistèrent pas moins dans leur conduite imprudente. D’ailleurs, en 1648 ils attendaient le Messie, selon la promesse contenue dans le Zohar, et l’espoir de la prochaine délivrance les rendait encore plus sévères pour les Cosaques.

Ils apprirent tout à coup avec effroi la rébellion des Cosaques, soulevés à la voix de l’hetman Bogdan Chmielnicki. Vaillant guerrier et habile stratégiste, Chmielnicki était en même temps cruel et perfide. Les Juifs l’avaient profondément blessé quand il occupait encore une situation subalterne. Aussi disait-il aux Cosaques, dès le début de la révolte : Le peuple polonais nous a livrés comme esclaves à ces maudits Juifs, et ces mots suffirent pour exciter les rebelles à tous les crimes. Les Zaporogues, alliés aux Tartares, battirent une première fois l’armée polonaise (1648). Après cette victoire, ils envahirent les villes situées à l’est du Dniéper, entre Kiew et Pultava, pillant et massacrant les Juifs qui n’avaient pas cherché leur salut dans la fuite. Plusieurs milliers périrent ainsi. Le sort de ceux que les Tartares firent prisonniers fut plus heureux ; ils furent transportés en Crimée et rachetés par leurs coreligionnaires turcs. Pour échapper à la mort, quatre communautés juives, comptant environ trois mille âmes, se livrèrent aux Tartares avec tous leurs biens. Ces Juifs aussi turent envoyés en Turquie et rachetés. Afin de réunir les sommes nécessaires au rachat de tous ces prisonniers, la communauté de Constantinople envoya un délégué en Hollande, pour y recueillir des subsides.

Pendant le règne de Ladislas, Chmielnicki, après ses premiers succès, parut disposé à traiter avec ce souverain. Malheureusement, Ladislas mourut, et, comme toujours, durant l’interrègne (mai-octobre 1648), la Pologne resta livrée à l’anarchie. Chmielnicki en profita pour faire dévaster les provinces polonaises par ses lieutenants. Il se forma de vraies bandes d’assassins, nommés haidamaks (partisans), qui accomplirent d’épouvantables tueries parmi les Polonais et les Juifs. Morosenko, l’un des chefs, qui faisait étrangler les femmes catholiques et juives avec des tanières de cuir, disait en raillant qu’il les ornait de colliers rouges.