Page:Graetz - Histoire des Juifs, A. Lévy, tome 5.djvu/298

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lui le sentiment du beau et le goût d’un langage pur et châtié. Il avait encore un autre point de ressemblance avec Mendelssohn. Lui aussi était d’un caractère élevé, d’une loyauté scrupuleuse et d’une grande dignité, mais il était moins conciliant, moins souple, moins doux. Raide, compassé, pédant, il avait plus d’érudition que de profondeur de pensée. Ce fut Mendelssohn qui le fit sortir de son obscurité. La communauté de Trieste, composée surtout de Juifs italiens et portugais, qui manifestaient moins d’aversion pour les sciences profanes que leurs coreligionnaires allemands, avait demandé au comte Zinzendorf, gouverneur de la ville, de l’éclairer de ses conseils pour l’organisation des écoles, telles que les désirait l’empereur Joseph. Zinzendorf l’engagea à s’adresser à Mendelssohn. Celui-ci signala alors à Joseph Hayyim Galaigo, délégué de la communauté de Trieste, les efforts tentés par son ami Wessely pour faire appliquer par ses coreligionnaires la loi édictée par Joseph II, et il lui recommanda de se mettre en relations avec lui.

Wessely avait, en effet, écrit un vrai dithyrambe en l’honneur de cette loi, parce qu’il en attendait les meilleurs résultats pour le judaïsme. Aussi, quand il apprit que les rigoristes de Vienne déploraient presque cette ordonnance de l’empereur comme une violation de conscience, envoya-t-il aux communautés d’Autriche une lettre hébraïque : Paroles de paix et de vérité (mars 1782), où il démontrait que c’était une obligation religieuse pour les Juifs d’acquérir une culture générale. Il traçait en même temps une sorte de programme d’études qui devait conduire graduellement la jeunesse juive de l’enseignement élémentaire jusqu’au Talmud. Son enthousiasme pour les réformes de Joseph II lui attira la colère des ultra orthodoxes. Riais, comme il défendait, en réalité, les idées de Joseph IM, ceux-ci n’osèrent pas l’attaquer ouvertement. Ils essayèrent simplement d’exciter contre lui quelques rabbins polonais pour faire condamner sa lettre et le frapper lui-même d’anathème. Hirschel, rabbin de Berlin, tenta aussi de le rendre suspect à ses coreligionnaires. Mais la communauté de Berlin était trop imprégnée de l’esprit de Mendelssohn pour prendre parti contre Wessely.

Malgré cet échec, les rigoristes continuèrent leurs attaques