Page:Graetz - Histoire des Juifs, A. Lévy, tome 5.djvu/347

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le cœur de tous les hommes et que la morale de chaque religion doit également inspirer comme la nature. Avigdor termina son discours par la proposition d’exprimer en séance la reconnaissance des délégués pour les bienfaits successifs du clergé chrétien dans les siècles passés en faveur des Israélites de divers États de l’Europe… alors que la barbarie, les préjugés et l’ignorance réunis persécutaient et expulsaient les Juifs du sein des sociétés, et de consigner l’expression de ces sentiments dans le procès-verbal. Cette proposition fut adoptée.

Quatre jours après la clôture des séances des notables, se réunit le grand Sanhédrin (9 février 1807). Comme on sait, il se composait pour deux tiers de rabbins et un tiers de membres laïques. Le 4 février, le ministre de l’Intérieur avait nommé les trois chefs : Sintzheim, président ou nassi ; Segré, premier assesseur (ab-bèt-din), et Abraham de Cologna, second assesseur (kakham). La première séance fut très solennelle. Les membres se rendirent de la maison du président dans la synagogue magnifiquement décorée, où étaient réunis de hauts personnages de l’État. Le discours de Sintzheim, en hébreu, ne produisit naturellement que peu d’impression. Mais, lorsqu’il sortit de l’arche sainte le rouleau de la Loi pour bénir l’assemblée et prier Dieu d’éclairer le Sanhédrin de sa lumière, l’émotion fut très vive. Le discours italien de Cologna obtint aussi un grand succès.

De la synagogue le Sanhédrin alla à l’Hôtel de Ville. Suivant l’ancien usage, les soixante-dix membres se placèrent en demi-cercle autour du président, par rang d’âge. Comme les séances étaient publiques, on y voyait toujours de nombreux assistants. Les membres du Sanhédrin étaient tous habillés de noir, avec un petit manteau de soie et un tricorne sur la tête. Ils avaient pour principale mission de convertir en lois religieuses tes réponses des notables et de se porter garants de la sincérité du patriotisme de leurs coreligionnaires français, allemands et italiens.

Sur la proposition d’Abraham Furtado, le Sanhédrin établit d’abord le principe que la loi mosaïque contient des dispositions religieuses et des dispositions politiques. Les premières sont, par leur nature, absolues, indépendantes des circonstances et des temps. Il n’en est pas de même des secondes : celles-ci, destinées