Page:Graetz - Histoire des Juifs, A. Lévy, tome 5.djvu/384

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Allemands. Ils se proposèrent donc de fonder, pour les Juifs, des écoles, des séminaires et même des académies, de les diriger vers les métiers et les travaux agricoles. Ces immenses projets se réduisirent à la fondation d’une école privée, où des membres de la Société instruisaient de pauvres jeunes gens, venus du dehors, notamment de la Pologne, pour échapper à l’ennui de l’étude du Talmud et acquérir la sagesse.

Lorsque la Société se fut convaincue de l’impossibilité de réaliser son plan si vaste, elle résolut de poursuivre une entreprise plus modeste, celle d’encourager les recherches scientifiques relatives au judaïsme. Ses membres organisèrent des conférences entre eux et créèrent un Journal pour la science du judaïsme. Mais au fond, ils ne savaient pas bien ce qu’ils devaient entendre par la science du judaïsme et hésitaient sur la voie où ils s’engageraient. C’est qu’ils étaient alors tous inféodés au système de Hegel, dont ils considéraient la moindre parole comme un oracle. Ils répétaient, après lui, en termes bizarres, que le judaïsme est la religion de la raison qui ne se préoccupe plus de la raison, et que le christianisme a absorbé toute l’histoire du passé pour la rajeunir et l’ennoblir. Leur chef, Édouard Gans, s’exprimait d’une façon si vague et parfois si baroque qu’on reconnaissait facilement que ses idées sur le rôle de la Société qu’il dirigeait manquaient de clarté et de précision.

On retrouvait la même obscurité, le même vague dans les articles publiés dans l’organe de la Société. C’était un fatras indigeste qui ne pouvait être compris que de quelques très rares lecteurs. Heine déclara ouvertement que la plus grande partie du journal ne valait rien, parce que c’était écrit dans un abominable jargon. Et c’est par de tels travaux que la Société voulait glorifier les Juifs et le judaïsme ! Dans un compte rendu, Gans se plaignait que lui et ses collaborateurs ne fussent pas compris : J’admets, dit-il, que la foule n’ait pas saisi la pensée qui dirige la Société, précisément parce que c’est une pensée et qu’elle ne comprend que ce qui est superficiel. Mais ceux qui se nomment les intelligents, les gens supérieurs, ont-ils donné de meilleures preuves de leur intelligence ?

Au lieu de s’en prendre d eux-mêmes de leur échec, à leurs