Page:Graetz - Histoire des Juifs, A. Lévy, tome 5.djvu/389

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Il indiqua la manière d’utiliser l’immense compilation talmudique au profit de l’histoire et de mettre en lumière des détails à peine perceptibles ou des traits à moitié effacés. Sans doute, les résultats de ses recherches n’offrent pas toujours une certitude absolue. Mais, grâce à son esprit sagace et à sa passion pour ce genre de travaux, il ne se trompa pas souvent. De plus, il inspira l’amour de ces recherches à ses disciples et les accoutuma à l’emploi de sa méthode. Bientôt, sa réputation s’étendit au delà des frontières de son pays, et la communauté de Berlin, malgré son antipathie pour les Polonais, l’appela comme rabbin. C’est qu’il était considéré comme un des principaux représentants de la science juive de cette époque et comptait en Allemagne de nombreux admirateurs.

Parmi les élèves de Krochmal, le plus doué et le plus brillant fut sans contredit Salomon-Juda Rapoport (né à Lemberg en 1790 et mort à Prague en 1867). Le disciple éclipsa même le maître. C’est que Rapoport eut, dès le début, le courage de publier ses découvertes, sans se laisser intimider par les menaces des obscurants ; il ne cessa d’opposer une fière vaillance à leurs attaques plus ou moins dissimulées. D’une affabilité séduisante, d’une humeur toujours souriante, spirituel sans la moindre méchanceté, Rapoport était partout accueilli avec une profonde sympathie. De bonne heure il sacrifia en partie l’étude du Talmud à la science et à la poésie. Il se sentait surtout attiré vers l’histoire juive, et le premier il fit connaître quelques-uns des principaux représentants de l’esprit juif. Il écrivit, en effet, coup sur coup (1829-1831) la biographie de plusieurs personnages historiques, sur lesquels il répandit une vive lumière, et fit ainsi mieux comprendre le judaïsme et son histoire intérieure.

Bien que Rapoport ne fût que l’élève de Krochmal, c’est pourtant à lui qu’on peut attribuer l’honneur du mouvement scientifique qui se développa si amplement dans le judaïsme. Le fleuve qui s’étend largement sous le ciel, transporte des navires et, en débordant, fertilise les terres voisines, a certainement plus d’importance que la source d’où part un petit cours d’eau coulant, à demi caché, sous le feuillage. Connu au loin par ses travaux,